Il y a beaucoup de débats, oserais-je dire buzz, sur le marché aujourd’hui concernant le passage imminent des réseaux mobiles à la 5G. Comment cela va-t-il fonctionner ? Que faut-il en attendre ? Où allons-nous avec la 5G ? Dans le billet d’aujourd’hui, plongeons au cœur du nouveau monde de la 5G et trions le faux du vrai.

Qu’est-ce que la 5G ?

Et bien, en dehors du fait qu’elle représente la prochaine génération de réseaux mobiles après la 4G, personne ne le sait vraiment. C’est parce que la 5G n’est pas encore normalisée et ne le sera pas encore pour un bon moment. Mais, dans notre secteur, nous sommes très optimistes et cela ne nous a pas empêché de prévoir (ou de rêver) les améliorations en matière de performances avec cette nouvelle génération d’infrastructure de réseau mobile.

Il existe deux façons de considérer la 5G : avec une vue orientée services ou avec une vue orientée réseau. Dans le cadre de ce billet, concentrons-nous sur la seconde.

Les différents acteurs opérant dans le secteur des réseaux sans fil (qu’il s’agisse d’équipementiers, d’opérateurs de réseaux mobiles ou d’analystes) ont des visions très diverses des réseaux mobiles 5G. Voici juste quelques-uns des gains de performance attendus à l’horizon mobile :

  • Jusqu’à 1 000 fois plus de bande passante par unité de surface
  • Jusqu’à 100 fois plus d’appareils connectés
  • Jusqu’à 10 Gbit/s de taux de connexion vers les appareils mobiles sur le terrain
  • Une disponibilité perçue du réseau de 99,999 %
  • Une couverture perçue du réseau de 100 %
  • Un délai aller-retour de bout en bout (délai de transit) maximal de 1 ms
  • Jusqu’à 90 % de réduction de la consommation énergétique du réseau

Vous voyez donc que la 5G va bien au-delà d’une simple augmentation de bande passante, même si c’est ce dont rêvent la plupart des abonnés de téléphone mobile, étant donnée notre affinité actuelle avec la vidéo mobile. Certaines de ces grandioses espérances seront peut-être atténuées, au bout du compte, dans l’effort d’un équilibre essentiel entre les performances et les coûts, mais certaines vont bien plus loin. Il convient cependant de viser haut pour cette nouvelle génération d’infrastructure réseau essentielle. Il faut oser rêver grand si on veut accomplir de grandes choses.

Le concept de « grand » est très subjectif… n’est-ce pas ?

Comment construit-on un réseau compatible 5G ?

Comment parvient-on à des gains de performances poussés en termes de vitesse, de délai de transit et de couverture ? En créant une architecture de réseau hétérogène (ou HetNet, comme on l’appelle généralement) comprenant différents types de cellules : WiFi, petites et les vénérables macrocellules. C’est par une utilisation intelligente de ces différentes cellules, à chaque fois qu’elles s’imposeront au niveau technique et économique, que nous atteindrons une architecture de réseau mobile 5G hautement flexible, optimisée pour des gains globaux et significatifs en termes de performances.

L’évolution vers les réseaux 5G aura un impact sur la totalité de l’infrastructure réseau de bout en bout, depuis la virtualisation du réseau d’accès radio (RAN) et du cœur de paquets évolué (EPC) jusqu’à la mise à niveau des interfaces hertziennes et radio, aux segments reliant les réseaux terrestres et aériens : le MBH (Mobile Backhaul Network). Les gains significatifs de performances en termes de capacité, de disponibilité et de délai de transit attendus avec la 5G s’imposeront in fine sur les réseaux MBH à des degrés variés.

Comment seront traitées ces demandes en capacité ?

La croissance des demandes en capacité sera traitée en profitant de l’augmentation des débits Ethernet de 1GbE à 100GbE (et 400GbE dans quelques années). Le débit choisi dépendra alors des prévisions de demande de trafic pour chaque cellule WiFi, petite ou macro, ou encore du nœud central regroupant le trafic à partir d’un ensemble de sites cellulaires différents. Ce dernier scénario poussera encore plus de trafic dans le réseau central, jusqu’aux gigantesques data centers hébergeant le contenu recherché.

La croissance de la bande passante au niveau du réseau central sera traitée en s’appuyant sur des débits DWDM cohérents de 100G, 200G et plus, ce qui est d’ailleurs déjà le cas aujourd’hui avec l’adoption généralisée de la 4G. En bref, des augmentations de la vitesse d’accès partout sur le réseau mondial.

Une haute disponibilité est atteinte en tirant parti des capacités de protection et de redondance déjà déployées sur la plupart des réseaux des prestataires de services. Des options pour protéger le réseau, telles que les anneaux Ethernet G.8032, permettent aux opérateurs de réseau de garantir des réseaux d’infrastructure et d’agrégation hautement disponibles.

La redondance des équipements et des alimentations, comme par exemple celles doubles et les batteries/générateurs de secours, permet aux nœuds du réseau d’être eux-mêmes hautement disponibles. Une intelligence routera ou commutera le réseau autour des défaillances et/ou des nœuds encombrés, afin que les utilisateurs mobiles (hommes ou machines) perçoivent un niveau constant de la disponibilité du réseau, même quand les inévitables pannes surviennent. Des méthodes logicielles, telles que les micro-services, rendront aussi les réseaux mobiles 5G plus fiables et évolutifs.

Peut-on obtenir un délai de transit de 1 ms avec la 5G ?

On s’attend à un délai de transit cinq fois plus faible sur les réseaux 5G que sur ceux 4G, avec une cible optimale impressionnante de 1 ms en cours de discussion. Sur la base de nos connaissances actuelles, il existe des lois fondamentales de la physique qu’on ne peut pas dépasser, telles que la vitesse de la lumière. En raison des propriétés intrinsèques du cœur de fibre optique, la lumière se propage le long de la fibre à une vitesse environ trois fois plus lente que dans le vide.

Le réseau de liaison mobile sans fil est plus rapide, car c’est un support de communications aérien. Il est cependant beaucoup plus limité en termes de capacité, portée et disponibilité. Quoi qu’il en soit, les liaisons sans fil occupent une place incontournable dans la plupart des réseaux MNO, et continueront à le faire. La question n’est pas de décider entre un MBH à base optique ou un MBH sans fil, car les deux seront amenés à progresser.

Pour remettre les choses en perspective, un service mobile exigeant un délai de 1 ms doit disposer d’une interconnexion à moins de 1 km de l’utilisateur mobile : pour parvenir à ce délai de transit, d’autres techniques en dehors des réseaux doivent aussi être mises en œuvre. L’approche de l’informatique en périphérie mobile promeut l’idée de localiser les capacités informatiques et celles du traitement en cloud associé directement dans le RAN lui-même. En situant le contenu, les services, les applications et les fonctions aussi près des utilisateurs mobiles que possible, on atteint des améliorations significatives en matière de délai de transit.

Toutefois, étant donnés les montants d’investissements colossaux nécessaires pour repenser l’architecture des réseaux mobiles actuels, certains se demandent si un délai de transit visant 1 ms sera effectivement inclus dans la norme 5G, si cette limite ne sera pas quelque peu relâchée, voire même totalement omise. Seul l’avenir nous le dira, même si un délai de transit réduit par rapport à la 4G restera sans doute, dans une version normalisée ou non, parce que cette réduction permet de proposer de nouveaux services et de dégager les sources de revenus associées, ainsi que la différenciation si chère aux MNO.

Qu’est-ce que tout cela veut dire ?

Le futur de la 5G changera tout en termes de performances de réseau et permettra de proposer une quantité incroyable de nouveaux services, même si les définitions exactes du nouveau réseau 5G restent ouvertes à débat. Nous n’avons pas fini de rêver de la plupart des nouveaux services innovants qui nous sont promis !

Les réseaux MBH critiques seront-ils capables de faire face aux visées attendues en matière de performances, quel que soit leur niveau ? Je crois que ce sera le cas car je reste convaincu que le meilleur moyen d’atteindre un objectif qui semble impossible est de dire à la communauté de R&D qu’elle ne peut pas l’atteindre. Ensuite, il faut prendre du recul et laisser la nature humaine à l’œuvre.

Qui aurait pensé il y a juste quelques décennies que l’intégralité des connaissances humaines serait à la portée de notre main, au sens littéral ? Dans cette ère nouvelle, nous n’allons plus à la bibliothèque : la bibliothèque vient à nous. La 5G va, sans surprise, tout changer. Et même si ses contours restent un mystère, il ne fait aucun doute que les ingénieurs d’aujourd’hui relèveront le défi pour faire de la 5G une réalité.

Références : « Understanding 5G - Perspectives on Future Technological Advancements in Mobile », décembre 2014 (GSMA Intelligence)